
La tradition de décorer les couteaux par gravure remonte à un passé lointain. Au Moyen Âge, presque toutes les armes personnelles de l'élite européenne étaient ornées de dessins sur métal pour témoigner du statut élevé de leurs propriétaires. Les gravures figuraient principalement sur les manches, les pointes et les gardes des épées, ainsi que sur les éléments métalliques des fourreaux. Plus tard, elles furent utilisées sur les épées, les rapières, les sabres, etc. Lorsque les armes blanches disparurent, la tradition s'étendit à des objets plus compacts : poignards, couteaux de chasse et couteaux pliants. Les plus populaires étaient les représentations d'animaux, de plantes, de scènes de bataille, etc. Cependant, la gravure manuelle, malgré son prestige et sa valeur élevée, était trop lente et improductive. Au début du XXIe siècle, elle était en voie de disparition, préservée uniquement grâce aux efforts de passionnés. La gravure laser, les tours et fraiseuses CNC, autrefois capables de réaliser les tâches les plus complexes en un temps record, ont propulsé l'usinage manuel des manches de couteaux vers le segment du très haut de gamme. De nos jours, une telle gravure est utilisée soit sur des produits artistiques destinés à l'origine à des fins de démonstration, soit sur les couteaux personnalisés les plus chers.

L'une des techniques de gravure moderne les plus intéressantes est la technique dite du « bulino ». Apparue au début des années 70 du XXe siècle, elle désigne la gravure ciselée, où la force des mains du graveur joue un rôle essentiel. Le terme « bulino » vient du nom de l'outil de gravure utilisé par l'école italienne des sculpteurs sur métal. Cette technique utilise une pointe fine et très acérée qui laisse un petit point lorsqu'elle frappe le métal. Les coups sont appliqués à différents angles et avec différentes forces. L'effet d'une image ainsi créée sur le métal dépend du jeu d'ombres produit par une multitude de points de taille et de netteté variables. La gravure obtenue est similaire à une image produite avec un écran en niveaux de gris et est communément appelée « gravure photoréaliste ». Elle offre une très haute définition et des détails souvent inaccessibles avec d'autres techniques de gravure. Il existe trois types de base de gravure : pointillée, lignée et mixte, bien que les deux premiers soient rarement utilisés sous leur forme pure et que le « bulino » soit généralement mixte.

L'ensemble de base des outils nécessaires à un graveur pour travailler dans la technique du boulino comprend : un burin (fraise en forme de diamant), une aiguille en acier, un spittishihl (fraise pour graver le contour d'un dessin), un étau à épingles ; divers appareils optiques : une loupe et un microscope ; divers crayons et teintures (vernis et peintures noirs), blanchisseurs, etc.

Les matériaux pour la gravure peuvent être n'importe quel acier et alliages (généralement avec une dureté jusqu'à 62 HRC, sans dépasser la dureté de la fraise), des métaux précieux (y compris les alliages à base d'or et d'argent), des métaux non ferreux et leurs alliages (melchior, cuivre, laiton, maillechort, aluminium, titane).

La gravure « bulino » est principalement appliquée sur la garde, les mitres en acier et les plaquettes du manche. On la retrouve également sur les vis de fixation ou les goupilles décoratives fixées au manche. Parfois, sur des pièces rares, ce type de gravure est appliqué directement sur la lame. Lors de l'affûtage de ces lames, il faut être particulièrement prudent et protéger les gravures avec du ruban adhésif. La technique du bulino est l'une des plus belles façons de décorer un couteau moderne, honorant une tradition séculaire du travail du métal.
